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Biden et l’Afrique

Les États-Unis ont donc un nouveau président, Joe Biden. Et la presse du continent s’en réjouit, à l’instar du quotidien Enquête au Sénégal : « la bonne nouvelle vient finalement de l’Oncle Sam. Dans la grisaille du Covid-19, avec des économies qui s’effondrent partout dans le monde et près de chez nous, des présidents qui rafistolent leur Constitution pour prolonger leur nirvana au pouvoir, la chute de Donald Trump est une belle lueur qui vient illuminer le monde, s’exclame le quotidien sénégalais. L’Amérique administre ainsi la preuve que même les plus coriaces des hommes politiques peuvent être proprement vaincus, à force d’organisation et de méthode. »

Toutefois, pointe encore Enquête, « si Joe Biden est forcément plus sympathique que Trump, qui a du mal à cacher son racisme primaire et moyenâgeux, l’Amérique n’est pas notre pays et ses intérêts ne sont pas nôtres. »

Vers un dégel ?

En effet, « quid des rapports Etats-Unis-Afrique avec le nouveau président Joe Biden ? », s’interroge le quotidien Aujourd’hui à Ouagadougou. Avec Donald Trump, les rapports avec le continent étaient réduits à leur portion congrue pour ne pas dire que l’Afrique était dans l’angle mort des Etats-Unis. ‘Ces pays de merde’, comme il les qualifiait, n’intéressaient guerre le néoconservateur. Rarement l’axe Afrique-Etats-Unis n’a autant été d’un froid polaire. »

Alors, poursuit Aujourd’hui, « faut-il s’attendre à un dégel ? Dans l’absolu non, répond le journal, car entre une Amérique ‘cassée’ entre Républicains et Démocrates, le nouveau locataire de Pennsylvanie avenue n’aura de répit que celui de colmater les brèches ouvertes par le Covid-19, le racisme, les suprématistes blancs, l’accord sur le climat, bref ‘adoucir la rhétorique et guérir l’Amérique’. Joe Biden n’aura pas le temps de regarder ailleurs et surtout pas vers le continent noir. »

Toutefois, « quelques lignes peuvent bouger, estime Aujourd’hui, à commencer par le brûlot éthiopien où sévit depuis une semaine un conflit armé. La Somalie avec la MISSOM et le Sahel avec le terrorisme peuvent aussi voir les choses changer un peu. Si Trump avait menacé de réduire les 50 millions de dollars versés en Afrique pour la lutte contre le terrorisme et de retirer les drones stationnés au Niger, on peut espérer que Biden ne le fera pas et arrondira les angles. Le Soudan en transition, par exemple, qui était en passe d’être retiré de la liste des pays terroristes contre une reconnaissance de l’État d’Israël, le Soudan pourrait voir cet acte entériné. »

L’Amérique d’abord…

WakatSéra, toujours au Burkina, s’interroge en écho : « Joe Biden renforcera-t-il l’appui des États-Unis, dans ce combat contre le terrorisme, en affichant une présence américaine plus soutenue dans ce Sahel pris pour sanctuaire par les djihadistes et bandits de tout acabit (…) ? Il faut l’espérer, car la détermination et les frappes régulières de la Force française Barkhane, et encore moins la lente mise en branle de la jeune force européenne Takuba, ne font visiblement pas l’affaire. En tout cas, poursuit WakatSéra, même si les Africains doivent attendre peu des dirigeants américains, logiquement préoccupés par l’’Amérique d’abord’, le continent a les yeux tournés vers les Etats-Unis où la démocratie vient une fois de plus de mettre tous d’accord. Pendant ce temps, en Afrique, la Côte d’Ivoire et la Guinée n’en finissent pas de compter leurs morts… »

Une politique plus « vertueuse » ?

Le quotidien en ligne Malikilé résume le sentiment général : « l’avènement de Joe Biden pourrait amener un changement de style, une politique un peu plus ‘vertueuse’ des États-Unis. Pour autant les Africains auraient tort de croire à un changement spectaculaire et profond de leurs relations avec l’Amérique à la faveur de l’arrivée d’un démocrate à la Maison blanche. L’exemple de Barack Obama est encore dans les esprits, pointe Malikilé. Président américain d’origine africaine, le 44ème Président des Etats-Unis n’avait pas caché aux Africains les immenses efforts à accomplir pour aspirer au développement, par l’éducation de leur jeunesse et par l’instauration ‘d’institutions fortes’, permettant des alternances politiques en douceur, gages de stabilité et de progrès. »

Enfin, pour le Point Afrique, « sous une présidence Biden, l’Afrique pourrait regagner son importance sans pour autant devenir le théâtre stratégique prioritaire des États-Unis. Le scénario d’un déclassement irréversible des Américains en Afrique est difficilement envisageable, quelle que soit l’issue du scrutin. Avec son réseau diplomatique dense (50 ambassades déployées sur le continent), une présence militaire imposante (7.000 soldats déployés sur 34 sites), et une attractivité de son modèle qui demeure, les États-Unis disposent encore de plusieurs leviers de reconquête de leur influence sur le continent africain. »