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Aux Etats-Unis, une investiture sous très haute tension

Loin de baisser les bras, les partisans de Donald Trump prépareraient de nouvelles manifestations pour la semaine prochaine, avant et pendant l’investiture présidentielle de Joe Biden.

L’alerte provient d’un bulletin interne du FBI, relayé par plusieurs médias américains lundi: des «manifestations armées» seraient prévues devant les 50 Capitoles d’Etat, à travers les Etats-Unis, et à la capitale Washington DC, à l’occasion de l’investiture de Joe Biden. Faisant craindre de nouvelles violences, après le siège meurtrier du temple législatif américain, mercredi. Ces manifestations, dont certaines seraient à l’initiative de «groupes extrémistes», estiment les enquêteurs, selon des sources de l’agence Associated Press, pourraient se tenir dès le 16 janvier dans les Etats et à partir du 17 jusqu’à l’investiture de Biden, le 20 janvier, dans la capitale fédérale. L’assaut sur le Capitole avait été précédé par des semaines d’appels à la violence sur les réseaux sociaux. Donald Trump, depuis privé de son compte Twitter, avait lui-même promis le 19 décembre sur le réseau social que la manifestation de mercredi serait «sauvage». Selon le SITE Intelligence Group, un groupe de chercheurs qui surveille l’extrémisme en ligne, ce tweet avait nourri pendant plusieurs semaines «une frénésie d’incitations, d’élaborations de stratégies, et d’adhésion à la violence contre les élus du Congrès».

«Ce n’est que le début»

Les chercheurs avertissent que l’attaque du Capitole a enhardi les supporteurs de Trump les plus radicaux. «Peu importe comment les choses se passent, ce n’est que le début», a par exemple menacé un utilisateur de TheDonald, un forum pro-Trump, rapporte le SITE. Des membres de milices ou de groupes anti-gouvernement, comme le mouvement pro-armes «Boogaloo» qui s’emploie à inciter une nouvelle guerre civile, soutiennent les manifestations aux Capitoles d’Etat. Certains adeptes de QAnon, cette mouvance complotiste pro-Trump, promeuvent également une «Million Militia March» le jour de l’investiture de Joe Biden.

Lundi, en réaction aux événements de la semaine précédente à Washington, le Michigan a voté l’interdiction du port d’armes à feu «visibles» (open carry) à l’intérieur du Capitole d’Etat, à Lansing, qui pourrait être ciblé par ces manifestations. Fin avril, le bâtiment avait été pris d’assaut par des manifestants armés, qui exigeaient l’assouplissement des mesures mises en place pour lutter contre l’épidémie de coronavirus. Certains des manifestants, des miliciens, ont été arrêtés et inculpés cet automne pour avoir voulu kidnapper Gretchen Whitmer, la gouverneure démocrate de cet Etat.

À Washington, le dispositif de sécurité va être augmenté après les violences intervenues le 6 janvier, qui ont fait au moins cinq morts dont un policier du Capitole. Critiqué pour avoir tardé à déployer la Garde nationale lorsque des partisans du président Trump ont violemment envahi le siège du Congrès, le Pentagone a autorisé le déploiement de 15 000 soldats dans la capitale américaine pour la cérémonie d’investiture de Joe Biden, le 20 janvier. Près de 6 200 militaires de la Garde nationale sont déjà présents à Washington, et ils seront 10 000 dès ce week-end.

Dans la foulée des violences, Donald Trump a reconnu jeudi du bout des lèvres qu’il quitterait le pouvoir et ne ferait pas de second mandat, sans pour autant concéder sa défaite ni mentionner le nom de son successeur. «Une nouvelle administration prêtera serment le 20 janvier», a-t-il noté dans un message vidéo, affirmant se «concentrer sur une transition de pouvoir ordonnée et sans accroc». Il n’est cependant pas, pour l’heure, revenu sur ses accusations, jamais avérées, de «fraudes» et d’«élections truquées», qui ont tant galvanisé ses soutiens depuis deux mois.

Les démocrates ont introduit formellement lundi un article de mise en accusation contre le président républicain, premier acte vers l’ouverture d’une nouvelle procédure de destitution, à neuf jours de la fin de son mandat. L’article accuse le président américain d’«incitation à l’insurrection» et «à la violence contre le gouvernement des Etats-Unis». Il cite les propos de Trump lors d’un discours face à ses partisans peu avant l’intrusion violente au Congrès, où il les encourageait à «se battre» et à se rendre au Capitole, pour protester contre la certification de l’élection présidentielle de novembre.

Responsable de la coordination de la sécurité lors de la cérémonie d’investiture, Chad Wolf, le secrétaire à la Sécurité intérieure des États-Unis par intérim, a annoncé lundi après-midi sa démission, dans le sillage des événements de la semaine dernière. Le 20 janvier, Joe Biden prêtera serment sur le thème de l’«Amérique unie», a fait savoir le comité d’organisation de la cérémonie. Il se rendra ensuite au cimetière national d’Arlington avec trois de ses prédécesseurs, Barack Obama, Bill Clinton et George W. Bush, et s’adressera à un pays polarisé à l’extrême. Un sondage Quinnipiac a montré que 73% des électeurs républicains jugeaient que l’attitude de Trump, mercredi, visait à «protéger» plutôt qu’«affaiblir» la démocratie.

Tous les quatre ans, des centaines de milliers de spectateurs se pressent dans la capitale fédérale américaine pour assister à la prestation de serment du nouveau président. L’accès sera cette année limité en raison de la pandémie, qui a coûté la vie à plus de 375 000 personnes aux Etats-Unis. La maire de Washington, Muriel Bowser, a exhorté lundi les Américains à ne pas se rendre à cette cérémonie, et à «participer de façon virtuelle» en la suivant en ligne ou à la télévision. Elle a également appelé à annuler toutes les autorisations de rassemblement pendant cette période. Donald Trump a déjà fait savoir qu’il ne participerait pas à la cérémonie. «Une bonne chose», a estimé Biden.