URGENT/CAISSE DE DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS: Aliou Sall démissionne de son poste de Directeur général
Voici le contenu de la lettre de démission d’Aliou Sall
Cette affaire autour du pétrole,
avant de prendre les contours d’un enjeu national voire international,
constitue aussi et d’abord un enjeu personnel, une véritable tragédie qui
touche un être en chair et en os, un homme qui éprouve des sentiments, qui a été
élevé dans certaines valeurs cardinales, qui vit en société, entouré de sa
famille, de ses amis et de ses sympathisants.
On semble malheureusement l’oublier.
En effet, cette campagne présente l’autre (moi en
l’occurrence), comme l’ennemi public numéro un, et elle se donne les
moyens de faire mouche parce qu’elle finit de prendre le visage de la vérité à
force de travestir les faits les uns après les autres.
Elle joue également de manière indécente sur la corde
sensible de populations qui se battent au quotidien pour vivre voire pour
survivre ; et à ces populations, elle s’emploie à offrir comme provision, des
raccourcis cyniques et dangereux du genre :
Lii yeen ako moom, ay nitt akiimoo ko, def ko seen yeufi
boop, niom ak seeni diabarr, seeni doom, seeni kharitt.
En somme, c’est une campagne visant à me « déshumaniser » (le
mot n’est pas trop fort), parce que c’est de cela qu’il s’agit, une campagne
qui présente l’autre (toujours moi) comme le méchant face aux bons, celui qui
s’abreuve du sang et de la sueur du peuple sénégalais, le personnage sans foi
ni loi qui nargue un peuple exsangue.
La caricature est sans pitié !
Qui ne serait pas indigné, choqué, offensé au plus haut point
par une telle tyrannie langagière, un tel déferlement de bavures au propre
comme au figuré.
C’est donc dire si je peux comprendre dans un certain sens,
ceux qui, de bonne foi, ont pu à un moment ou un autre, prêter une oreille
attentive et bienveillante aux propos tendancieux déversés à longueur de
journée, ou même ceux qui ont choisi de hurler avec les loups parce que tout
simplement mus par une haine viscérale.
Ainsi va le monde ! Et lorsque la perfidie du champ politique
se mêle à la duperie érigée en dogme, l’ombre prend de l’épaisseur et la
lumière est réduite à sa plus simple expression.
Que Dieu nous préserve de la méchanceté gratuite, et surtout
du mensonge structuré !
Face à une telle entreprise de déstabilisation savamment
construite, il faut l’avouer, il y avait, à mes yeux, deux réponses à apporter
: l’une par la prise de parole publique, l’autre par les
actes.
Faut-il rappeler que j’avais dans un premier temps décidé de
répondre point par point aux accusations iniques sur mon appartenance à telle
ou telle société, sur des éléments de salaire, sur des versements de
commissions indues, sur une rente pétrolière ahurissante étalée sur pas loin
d’un demi-siècle. Pas moins.
Certains parmi mes compatriotes ont bien saisi la substance
du message que j’ai voulu délivrer et y ont souscrit. D’autres ont continué
leur entreprise de destruction en s’inscrivant bien entendu, toujours dans leur
logique préconçue de politique de la terre brûlée.
Toutes choses qui ont fini de pousser l’Etat du Sénégal à
ouvrir une information judiciaire pour donner corps à sa volonté de rétablir la
vérité d’une part, et celle de prendre les mesures idoines, d’autre part.
Bien évidemment, comme je l’ai dit, depuis le premier jour,
toute cette malheureuse controverse n’est entretenue qu’autour d’un tissu
d’amalgames et de contrevérités destinées à alimenter une autre campagne, plus
insidieuse, celle-là, et qui va au-delà de ma modeste personne.
Croyez bien que je suis le premier à être en phase avec cette
décision de l’Etat du Sénégal.
Ceci dit, il s’agit aujourd’hui d’apporter la seconde réponse.
C’est la raison pour laquelle j’ai voulu moi aussi m’adresser aux sénégalais et
à l’opinion internationale à travers la vaillante population de Guédiawaye qui
m’a fait l’honneur de m’accorder sa confiance, mais aussi qui, au milieu de la
tempête et des vagues successives de diffamations, de critiques et d’insultes
de toutes sortes, n’a de cesse de me manifester son soutien, à l’instar de
nombreux autres sénégalais d’ici et d’ailleurs, révulsés par l’ampleur de la
cabale et de l’injustice.
Je remercie toutes ces personnes, souvent des anonymes, qui
me témoignent tous les jours leur sympathie et leur affection.
Je tiens donc à répondre cette fois-ci par les actes parce
qu’il est aussi de mon devoir, pour le présent comme pour l’avenir, pour ne pas
dire pour l’histoire tout court, il est de mon devoir de laver mon honneur
sali, de protéger les miens qui sont aujourd’hui encore plus touchés que moi
dans leur chair et dans leur esprit. C’est à la fois un problème de justice, de
dignité mais aussi de responsabilité.
Monsieur Le Président de la République qui, au-delà du même
sang que nous partageons, sait, mieux que quiconque, dans quel moule de vertu,
de sagesse et d’humilité nous avons été éduqués ensemble et qui m’a témoigné sa
confiance pour assumer une charge publique, comprend les actes que je pose en
ce moment précis.
Permettez-moi ici de lui renouveler mes remerciements les
plus sincères.
Pour dire enfin, que, fort de la conviction profonde que
demain il fera jour, et que la lumière finira d’avoir raison des ténèbres, je
prends ici devant vous la décision de donner ma démission de la tête de la
Caisse de Dépôts et de Consignations à compter de ce jour.
Dans le même temps, je peux vous assurer, mes chers amis, que
je prends date pour l’avenir, parce que je reste persuadé que cette épreuve
rendra beaucoup de service à mon peuple dans le futur.
Elle aura en effet le mérite, j’en suis sûr, de montrer à la
face du monde les vrais visages de ceux qui salissent la noblesse de la
politique sous des dehors de serviteurs du peuple.
Je vous remercie.
Aliou Sall
Maire de Guédiawaye.